Inde et Sri Lanka par les spécialistes

BHOUTAN Leur quotidien

BHOUTAN Leur quotidien est rythmé par la méditation, la discipline, les débats, les cérémonies, les festivités, les études religieuses, mais aussi les mathématiques, les sciences et les langues. Dès leur plus jeune âge, ils entrent au monastère et y restent des années, voire toute leur vie. Voici les jeunes moines du Bhoutan. En juin 1999, la population du Bhoutan avait 46 chaînes de télévision à choix. Au premier abord cela n’a rien d’extraordinaire, si ce n’est que la télévision était jusqu’alors interdite dans le pays. Mais ce mois-là, le gouvernement a levé cette restriction. Le Bhoutan est ainsi devenu la dernière nation au monde à introduire ce média. Les habitants, qui menaient une vie très traditionnelle, ont été confrontés à une multitude d’idées et d’influences nouvelles. Avec des conséquences considérables. Les critiques déplorent que de nombreuses valeurs transmises par le biais du petit écran sont en décalage avec la culture bhoutanaise. Les partisans eux se réjouissent car la télévision fait progresser l’éducation et l’accès à l’information favorise le développement d’idées nouvelles. Cet exemple illustre le défi actuel du Bhoutan : trouver un juste milieu entre préserver la culture et se tourner vers l’avenir. Pendant des siècles, le Bhoutan a été en grande partie isolé du reste du monde. Seules quelques routes mènent au Druk Yul, le nom du pays dans la langue locale, et un seul aéroport assure les liaisons internationales. Pendant longtemps, les difficultés d’accès et le coût élevé du voyage ont découragé les visiteurs potentiels. C’est dans cet isolement que la culture bhoutanaise a pu conserver sa fascinante originalité. Le bouddhisme, auquel appartiennent actuellement environ trois quarts de la population, est étroitement lié à cette culture. La foi imprègne toute la vie quotidienne. Les temples et les stupas, les drapeaux de prière et les moulins à prière sont omniprésents. Tout comme les dzongs. Forteresses et festivals Le Bhoutan compte pas moins de 2'000 monastères-forteresses historiques en argile, en pierre et bois, construits au 17 e siècle à des fins de défense et de stockage de céréales. Les couleurs et les éléments de construction respectent les enseignements du bouddhisme. Aujourd’hui, les bâtiments, avec leurs hauts remparts et cours intérieures fermées, remplissent principalement des fonctions administratives et religieuses. Ils jouent également un rôle important dans de nombreux festivals. Et on aime beaucoup faire la fête au pays du dragon du tonnerre. Partout, les gens se rassemblent en l’honneur de Guru Rinpoche, le saint qui a introduit le bouddhisme au Bhoutan au 8 e siècle. Autour des dzongs, on les voit vêtus de leurs habits colorés. Au même moment, des moines masqués exécutent des danses censées leur apporter l’illumination. Le driglam namzha, le code officiel en matière d’étiquette et de code vestimen- taire, est tout aussi ancien que les dzongs. Il établit les critères pour les tenues quotidiennes et festives. Le driglam namzha ne doit toutefois pas être considéré comme une contrainte. Le costume traditionnel bhoutanais jouit d’une grande estime auprès des citoyens et leur procure un sentiment d’appartenance. Les femmes portent la kira, une robe en soie ou en coton qui leur arrive aux chevilles, tandis que les hommes revêtent la gho, une robe qui leur arrive aux genoux et qu’ils nouent avec une ceinture. Un monarque qui se modernise Tout en étant fier de ses traditions, le Bhoutan accepte désormais les influences extérieures contemporaines. Cela est dû en grande partie à l’actuel Druk Gyalpo, le «roi dragon», comme on appelle le chef d’État du pays. Actuellement, c’est Jigme Khesar Namgyel Wangchuck qui porte la «couronne du corbeau géant». Il est perçu comme un modernisateur, un roi du peuple qui est monté sur le trône d’or à une époque marquée par le changement et qui ouvre la porte de l’avenir avec beaucoup de prudence. Au Bhoutan, le bonheur des habitants est plus important que la prospérité selon les critères occidentaux. Cette valeur peut même être mesurée. Le «bonheur 136

BHOUTAN Tambours, trompettes et gongs entraînent les danseurs masqués. Ils tournent de plus en plus vite et sautent acrobatiquement dans les airs. Une danse épique avec des divinités pacifiques et en colère. Les danses masquées font partie intégrante de la culture bhoutanaise! national brut» est une approche qui permet d’appréhender le bien-être de la population dans son ensemble. Il s’oppose au revenu national brut, qui est déterminé exclusivement par les flux financiers. Au Bhoutan, le bonheur national brut se calcule à l’aide d’un questionnaire. Quatre piliers sont au cœur du sondage: la préservation et la promotion des valeurs culturelles, la protection de l’environnement, la bonne gouvernance et les structures administratives ainsi que le développement social et économique équitable. Des expériences de qualité plutôt qu’un tourisme de masse Le tourisme doit être un moteur de l’économie. Ce qui ne veut pas dire que des masses de voyageurs vont soudainement affluer dans le royaume. Au contraire, un tourisme durable et de qualité est en train de se développer au Bhoutan. Le gouvernement souhaite ainsi accroître le bien-être du pays et de ses habitants tout en protégeant la culture et la nature. Non seulement le coût minimum relativement élevé d’un séjour, mais aussi le nombre limité de chambres d’hôtel et de vols maintiennent le nombre de visiteurs à un niveau raisonnable. L’énergie hydraulique reste cependant l’épine dorsale de l’économie bhoutanaise. L’interaction entre le débit rapide des rivières et tout au long de l’année, les bonnes conditions climatiques et une masse de terre avec des altitudes différentes favorise cette forme de production d’énergie. Les relations amicales avec le pays voisin du sud font le reste. L’Inde apporte un soutien financier et technique à la réalisation de projets et exploite en même temps une source qui aide à couvrir ses propres besoins en électricité, pourtant très élevés. D’abord le fromage, ensuite la démocratie Un autre pays avec lequel le Bhoutan entretient une amitié profonde– même sans proximité géographique - est la Suisse. Cette estime remonte aux contacts personnels entre le roi Jigme Dorje Wangchuck et l’industriel Fritz von Schulthess. Dans les années 1950, le Suisse a financé les premiers projets de développement dans le pays. En guise de remerciement, le roi a offert deux éléphants à l’industriel. «Ce sont les premiers ambassadeurs du Bhoutan en Suisse », a dit un jour Fritz Maurer à propos des pachydermes. Avec l’organisation humanitaire Helvetas, il a construit la première fromagerie du royaume dans les années 1970. Plus tard, les Suisses ont transmis leur savoir-faire dans les domaines de l’agriculture, de la culture fourragère et de l’élevage. Notre expérience de la démocratie a également aidé le pays. En 2006, le roi Jigme Singye Wangchuck, père de l’actuel héritier du trône, a annoncé les premières élections libres au Bhoutan. Deux ans plus tard, la démocratie a été introduite au Bhoutan et Helvetas a soutenu les autorités dans la réalisation de nombreuses tâches complexes. La fabrique de fromage ouverte il y a plus de cinquante ans par Maurer à Bumthang produit encore aujourd’hui du gouda, du gruyère et de l’emmental de la plus haute qualité. Juste à côté, la «Red Panda Brewery» brasse une savoureuse bière de blé aux arômes de banane. Le Swiss Guest House, qui a longtemps été le seul hôtel à Bumthang, est également l’œuvre de Maurer. Il se compose de deux maisons d’hôtes avec des chambres standard et d’une maison principale avec un restaurant. Au menu, des spécialités bhoutanaises, mais aussi de la fondue, de la raclette et des röstis. L’aménagement de la ferme rénovée s’inspire des cabanes de montagne suisses. Ainsi, un petit air de Cervin s’ajoute à l’Himalaya – et le dragon du tonnerre à son accent suisse. 137